Friday, November 29, 2013

Chicago décapoté (66 - 6)



               Donc, après cette rencontre pédestre avec certains aspects de la cité, cette mise en bouche architecturale de lignes hautes et d’altitudes infinies, cette promenade modeste entre les champignons de la ville, nous montions les escaliers de fer de la station de métro (je rappelle qu’il est surélevé), pour nous enfoncer jusqu’à la frontière de la banlieue, descendre dans les océans de brique qui baignent les pieds des buildings, explorer les rues plus calmes des pavillons individuels dont sont formées les banlieues.

Trouver une voiture et partir ! Ce métro sur pilotis, qui surplombe les rues sans jamais redescendre (imaginez les stations Barbès ou Glacière à Paris), donne un assez grand panorama sur cette ville. Le spectacle des zones résidentielles de la périphérie, moins solennel que ceux des bords du lac, révèle un autre aspect de Chicago, qui n’est ni bourgeois ni ciel-gratteur, mais plutôt fait de friches industrielles, de bâtiments abandonnés aux graffiti et au temps, de ces maisons de brique alignées mais séparées les unes des autres de quelques centimètres pour le principe, de vert-de-gris ou de métal rouillé, de cours un peu sales et de fils électriques en évidence.

Dans le métro des zones populaires de Chicago qui nous porte, deux blacks viennent faire entendre leur voix sur des airs de blues ou de soul, à l’adresse des passagers, sans que cela soit pour autant comparable à l’accordéoniste du RER qui vous casse les oreilles pour tenter de vider votre portefeuille (« Faites-le taire ! ») ; les gens finissent par discuter avec les chanteurs, demander le nom de leur groupe et leur pseudonyme sur les réseaux sociaux. On peut aisément faire la conversation avec son voisin dans la rame de métro, sans paraître étrange ou même excentrique. N’est-ce pas une bonne occasion de tuer le temps, mais surtout de rencontrer des habitants et d’en savoir un peu plus sur la ville, telle qu’elle est vécue par des personnes réelles ?

En essayant de nous retenir d’avoir nous-mêmes le blues, de rester enthousiastes pour partir sur les chemins d’un pied léger et d’un cœur joyeux… snif… nous trouvons notre décapotable, flambante neuve (non, bien sûr, d’occasion) dans un garage que nous avions repéré et en gros évalué au préalable. C’est dans ce garage Apollo, de l’avenue Cicero (vous aurez l’occasion de constater que les lettres classiques ont un certain succès dans la topologie américaine de cette région) que fut élevée Denise, Chrysler Sebring 1999 (une belle américaine), intérieur cuir, extérieur rouge pour être camouflé dans l’Arizona, pilotage automatique, boîte automatique évidemment, regular 89 dans l’estomac. Beauté, charme et coup de foudre à payer en cash, si possible avec de vrais billets (le vendeur nous explique qu’il vient de perdre 3,000 dolls en paiement en faux billets, qui a dit que Chicago était la ville des gangsters ?).

On laisse faire, durant les longues heures de la matinée et du début de l’après-midi, les quelques réparations accessoires mais bien utiles sur notre bolide (autoradio, pneus, klaxon)… Puis on se met en chemin, motorisé cette fois, vers le centre-ville. C’est vers la bonne piste que nous voulons partir, celle qui commence sous le mythique panneau de Jackson street, son double 6 au-dessus du trottoir, son rêve sur panneau indicateur, son solennel « End » qui signifie extrémité, et donc paradoxalement début, commencement… naissance !  Lors, un bruit bizarre commence déjà à naître dans le moteur, dont nous aurons malheureusement l’occasion de reparler plus loin. 




Nous ne pouvions pas, cependant, partir le ventre vide. Non, je ne résiste pas à ce point du récit à la tentation d’un paragraphe inutile, sans rapport direct avec la 66 si ce n’est qu’on s’y sentait déjà ailleurs, à la tentation de vous décrire ce que nous avons expérimenté lors de l’une de mes activités favorites (les repas), dans une chaîne de restauration aux airs de légumes, répondant au doux nom béni par les tomates et chéri par les haricots de Jason’s deli.

 Scrountch ! Miam ! Un salad bar ! A volonté ! Pour huit dollars ! On peut donc trouver proportionnellement moins cher (donc manger plus) que les sandwiches à 7 dollars (+ tax) des grandes avenues ! Sapristi ! Miam ! Tous ces champs de légumes vus de l’avion avaient donc une raison d’être !

En plus de menus conçus pour les flemmards de l’appétit et les grévistes de la gourmandise, le hall culinaire du Jason’s deli est principalement occupé par le buffet, grand, et rempli de tous les ingrédients d’une salade bien composée, qu’elle soit sucrée ou salée, de légumes ou de fruits, de noisettes ou d’amandes, de fraises ou de tomates, de chou croquant ou d’œuf flexible, de fromage râpé ou de coulis délicat, de sauces diverses ou d’une pure huile d’olive. Vous pouvez remplir votre assiette autant de fois que votre ventre le désire, autant que votre estomac flétri de hamburgers éprouve le besoin de se ressourcer, autant que dure votre hypnose névrotique du vert dans une ville où la brique le dispute parfois à la pierre.


En me servant, je soupçonne mon voisin d’être un jour tombé amoureux d’une salade : il se penche sur les laitues si amoureusement ! De quoi faire mentir tous les clichés sur l’alimentation américaine, qui sait être mauvaise quand il le faut, mais qui propose aussi ses plats de légumes, ses régimes vegan et ses menus végétariens à ceux que la vue d’une carotte ou d’un haricot vert ne fait pas frémir. 

A suivre...


Wednesday, November 27, 2013

Chicago (3) : The Loop II


De nouvelles images du Loop, du haut, du bas. 



Le Loop, vu non plus depuis le côté lac, mais depuis le côté banlieue. 



Voyez les immeubles gratter le ciel. 



Architectures plus modernes, mais toujours aussi systématiques. 



Les rues ne sont pas moins vertigineuses dans leur longueur que les bâtiments dans leur hauteur. 



Un petit clin d'oeil à notre pays. Du fromage ? Du vin ? 



Leur jeu de reflets, de nuages, d'immeubles partageant la façade de ceux d'en face grâce aux vitres réfléchissantes. Il faut avouer que Chicago a du charme. 



Les rivières de Chicago, qui bavent continûment dans le lac Michigan. 



Les immeubles au-dessus de la rivière; il en faut peu pour me charmer, mais je trouve cela fantastique. 



Le métro surélevé passe sur un pont et rejoint le côté lac du Loop. 



Pour traverser, les piétons touchent du bois. 


Souvenir néoclassique.



Flèche d'église sur un building.



Petites voitures, petits hommes, c'est vous là en bas.



Peut-être quelqu'un qui a pu suivre la visite guidée peut-il identifier les différents bâtiments ?





                                        

Un peu des couleurs de l'Oncle Sam sur les bâtiments publics, ça ne fait pas de mal. Difficile de les manquer. 






Belles ornementations métalliques. Certains trouvent que c'est trop, mais non, je trouve que cela demeure élégant. 



Sculptures un peu incompréhensibles (est-ce cela forcément, la "modernité"?) au milieu de tant de majesté et de grandeur. 



La VRAIE victoire de Samothrace, en or, une copie en marbre étant conservée au Musée du Louvre à Paris. (Surtout ne croyez pas tout ce que dit l'auteur de ce blog.)


Wednesday, November 20, 2013

Les gens de Chicago (66 - 5)

     
           La densité de circulation sur les trottoirs de Chicago peut décourager le voyageur venu pour la simple admiration du bâti. On se surprend à retrouver certains sentiments parisiens : « Comment vais-je réussir à doubler ce piéton après avoir slalomé trois fois entre les groupes de devant et m’être trouvé face à face avec cinq personnes en rang sur toute la largeur du trottoir ? »

Ici, le crime de ralentir sur un trottoir est presque aussi sévèrement puni que dans notre capitale : dans le flot des piétons, une jeune femme me demande de marcher plus vite (-En bousculant les gens de devant ou en défonçant la barrière des travaux, mademoiselle?), puis elle trouve (heureusement pour moi) un moyen d’accélérer son mouvement vers le lieu sacré où son urgence la poussait, un établissement vénérable en bas d’un building, oui, un temple de l’Amérique s’il en est : un magasin de Saint-Disney, où elle allait assister (et participer, car on participe toujours à une messe, sinon ce n’est qu’un spectacle) à la messe de la consommation hebdomadaire de son existence (amen le caddie), communier à l’acte sacré de l’achat, et rentrer chez elle toute légère de la bénédiction solennelle de la caisse.

En vérité, ici, les gens semblent plus préoccupés qu’à LA, sans cesse affairés, pressés, en costume de businessman ou de cadre supérieur. Ils ne sourient pas aux inconnus, et de toute façon sourient moins ; leurs regards sont vides ou tournés vers le sol : parce qu’on ne se nourrit pas des illusions de Hollywood ? parce qu’il est plus banal de croiser quelqu’un dans la rue ? parce que c’est la ville du blues et des gangsters ?

Bon, et en même temps disons-le, on croise moins de BG que dans la Cité des Anges. Les Apollons de muscles et de tatouages, les minces Vénus blondes ne se retrouvent pas sur ses trottoirs grouillant de monde. Les habitants, en général, sont relativement plutôt plus ou moins sensiblement généralement assez dodus (prenez « dodu » dans toute la largeur du terme) ; par exemple, le bonhomme Michelin pourrait rayer son nom du Guinness mondial des records. On croise beaucoup de blacks, qui représentent tout de même un tiers de la population, du fait des grandes migrations qui ont suivi l’abolition de l’esclavage dans le Sud, à côté d’un tiers de caucasiens et un tiers d’origines diverses.

Pour leurs vêtements, certes, les gens de Chicago ont un tant soit peu de goût, ou du moins un goût différent, plus sobre que vers l’autre océan ; en tout cas, ici, on sait qu’on ne met pas de baskets sous une jupe (c’est un secret européen). Les jeunes filles, aussi, et cela mérite sans doute d’être remarqué, ont à leur beauté cette imperceptible imperfection qui fait qu’il est possible de tomber amoureux d’une fille, et dont il m’est difficile de ne pas penser que c’est aussi un caractère européen. En attendant, à tous ceux qui ironisent sur la superficialité de LA, à commencer par les pseudo-hippies de San Francisco et les touristes exigeants envoyés par la France, j’aimerais montrer ce Chicago, qui serait tellement plus agréable avec des sourires au lieu de l’absent-mindedness ou des grimaces.
 
Les habitants de Chicago nous ont donc paru globalement réservés comme des Européens français, sans pour autant être timides, même si les employés des magasins et les serveurs des restaurants se montraient tout aussi serviables que ceux du reste des États-Unis.  Car on trouve encore à Chicago des occasions de dire merci : une dame vient vers vous, petit voyageur perplexe devant un plan municipal, pour vous expliquer par où passer pour gagner en métro telle avenue plus ou moins lointaine tout en évitant de tomber par inadvertance dans le jardin d’Al Capone, puisque avec ses quatre-cent meurtres par an (contre presque mille dans les années 1970), la criminalité à Chicago reste plus élevée encore qu’à Los Angeles ou New York.

            Quant aux personnes sans abri, elles m’ont semblé plus nombreuses que dans notre métropole californienne, moins agressives qu’à San Francisco, quoique je ne puisse pas non plus porter de jugement solide après seulement une ou deux journées passées dans la ville. En tout cas, assis au coin d’une rue ou à la sortie du supermarché, ils regardent passer tour à tour la gentillesse, la mauvaise et la bonne conscience, la générosité en étant parfois aussi maigres que leurs dreadlocks. On n’aura jamais fini de parler des écarts de richesse aux États-Unis, qui sont les plus grands de la planète, même s’ils sont assortis d’une mobilité sociale relativement plus élevée qu’en Europe. L’Amérique est à la fois aussi grande que ses buildings et aussi petite que les économies de ses sans-abri.  

             A suivre...


Monday, November 18, 2013

Chicago (1) : Bourgeoisie des bords de lac

Les photos ont l'air plus petites qu'avant ? 
Mais non, maintenant vous pouvez cliquer dessus pour les agrandir. 


Mises en garde à ceux qui, inaugurant leurs séjours en auberge de jeunesse et n'ayant pas eu l'entraînement des colonies de vacances, ont encore besoin de quelques règles. Oh ce n'est pas une question d'âge. 



L'auberge de jeunesse. Toutes les langues s'y parlent, tous les visages s'y croisent. Celle-ci était un peu plus hôtel qu'une auberge de jeunesse normale, mais l'ambiance restait assez sympathique.



L'un des quartiers bourgeois, élégant, de Chicago.



La petite maison s'accote à sa grande soeur grise. 



Toujours ces pavillons élégants, auxquels la brique donne un air fabuleux de Nouvelle-Angleterre. 



Les formes des maisons peuvent vous faire penser à Santa Cruz ou à San Francisco, Californiens; mais ici, c'est de la brique ou de la pierre. 



Bonjour lumière ! Viens, entre, n'hésite pas, c'est le matin et le jour commence. 



A quelques pas de ces maisons bourgeoises, des immeubles démesurés. 



Ces hauts immeubles surplombent quelques petits commerces. 



Sculpture feuillue près des parcs des bords de lac. 



Les vélibs de Chicago ! 



Ne dirait-on pas... quelque chose comme Paris ? Juste à côté du lac.



Ah, il y a des nuages ici. Ce n'est pas grave, ils sont jolis aussi. 



Les feuillages coiffent le tableau des rues bourgeoises de leur chevelure. 



Et puis la nuit finit par tomber. Une pièce d'eau, je ne sais plus si elle était reliée au lac, mais quel bel endroit pour retrouver ses amis arrivés d'Europe, prêts à partir à trois sur la Route, avant une dernière méditation collective sous les auspices placides de la lune ! 


Saturday, November 16, 2013

Chicago (2) : The Loop I

Quelques images du Loop et de ses environs, c'est-à-dire du centre de Chicago, plein de ses buildings gigantesques. 



L'impression provoquée par le caractère rectiligne des rues, associé à la hauteur des bâtiments me semble vraiment propre à l'Amérique. C'est peut-être un des éléments qui manquerait à rendre charmant La Défense à Paris. 



La Harold Washington Library, qui est le plus grand bâtiment de bibliothèque publique du monde. 



Ah, le fameux métro surélevé de Chicago. Mais si, vous le connaissez. 



Le panneau symbolique de Jackson street, où nous allions entamer notre périple. 



L'un des immeubles de cette rue. 



Les buildings de Chicago vus depuis le parc du bord de lac. 



Chicago, c'est par ici (depuis le parc). Les dimensions des bâtiments associées à un style d'apparence assez ancienne sont assez étonnantes pour un Européen. 



L'un des parcs de bord de lac. 



Entrée de l'une des universités de Chicago. Le vert-de-gris, dernier métal qu'on trouverait de l'autre côté de l'Amérique. 



Encore la Harold Washington Library avec son architecture monumentale de briques. 



J'ai pris la photo pour la campagne de publicité originale qui s'y produisait. De jeunes gens sur leur machine électrique à marcher. 



Sculptures amusantes juste à côté de la salle de concerts. Les ampoules changent de couleur. 



Beaux bâtiments à l'architecture variée. Vous voulez sûrement en savoir plus, alors allez visiter Chicago en prenant l'option de visite guidée, car nous n'avons pas eu le temps de la faire et elle semblait passionnante. 



Les escaliers de secours. 



Mélange de bâtiments différents, avec un peu de circulation dans leurs rues. 



Bâtiments à toits d'église. 



Le fameux cinéma de Chicago. Vous voyez le C sur la pochette du film du même nom de 2002. 


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